Légendes

Le curé en chasse-gallerie

(Saint-Jérôme, Lac Saint-Jean)

Le curé de Saint-Jérôme se rend dans un camp de bûcherons chanter la messe de

Cette année-là, le fête de Noël serait triste au Camp-au-Bouleau: le cook avait dû descendre précipitamment dans sa famille, à Métabetchouan, cr son épouse était malade. De plus, on ne chateraient pas la messe de minuit; le vieux missionnaire venu l'année précédente avait refusé de s'aventure si loin à son âge. Mais les bûcherons avaient quand même voulu donner un air de fête à leur camp en le décorant de banderoles "d"étoiles de sapinage".

Le père Joseph Morin, comme d'habitude, s'était mis à raconter ses "histoires de peurs" et tous les bûcherons l'écoutaient religieusement. "Tiens, dit-il, c'était un soir de Noël, comme ça, alors qu'on passait le temps en attendant la messe de minuit; voilà qu'il fit soudain un sifflement dans les airs, puis on entendit comme un choeur de chants qui passa bas sur la maison. Moi, j'avais une dizaine d'années, pas plus, et avec mes petites soeurs et mes petits frères, nous étions en train de glisser, tout près de la maison. Mon père sortit puis, après un moment, il rentra en disant à maman et aux plus vieux que c'était une chasse-galerie en canot d"écorce qui s'en allait "franc sud", vers les Bergeronnes".

Au même moment, le mesureur de bois, un jeune homme instruit qui pilotait aussi le petit avion de la compagnie, sortit alors soucement du camp accompagné de deux bûcherons. Il venait de penser que son aéroplane, abritédepuis l'automne près du lac de la Belle-Rivière, voudrait peut-être démarrer pour aller chercher un curé. Après bien des efforts, l'avion s'élança enfin sur la glace du lac et prit les airs en direction de Saint-Jérôme.

Il s'était passé tout au plus deux heures depuis son départ; dans le camp, le père Toine Gauthier, un bon conteur, retenait à son tour l'attention des bûcherons. Tout à coup un vrombrissement passa au-dessus du camp et coupa net la parole au conteur. On en déduisit que c'était probablement une "sorcière de vent". La porte du camp s'ouvrit bientôt et le curé de Saint-Jérôme apparut, les bras chargés de rôtis de viande et de "galettages". "Je suis venu en chasse-galerie, dit-il. Le diable va passer me prendre demain matin. Commençons les confessions tut de suite; on n'a pas de temps à perdre avant de chanter la messe de minuit".

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